A l’occasion de la remise du prix Lumière à Michael Mann ce vendredi 17 octobre 2025 retour sur Hacker (2015), diffusé au festival Lumière comme l’ensemble des films du grand réalisateur américain.
À Hong Kong, la centrale nucléaire de Chai Wan a été hackée. Un logiciel malveillant, sous la forme d’un outil d’administration à distance ou RAT (Remote Access Tool), a ouvert la porte à un autre malware plus puissant qui a détruit le système de refroidissement de la centrale, provoquant la fissure d’un caisson de confinement et la fusion de son coeur. Aucune tentative d’extorsion de fonds ou de revendication politique n’a été faite. Ce qui a motivé cet acte criminel reste un mystère.
Un groupe de hauts gradés de l’APL (Armée populaire de libération chinoise) charge le capitaine Dawai Chen, spécialiste de la défense contre les cyberattaques, de retrouver et de neutraliser l’auteur de ce crime.
À Chicago, le Mercantile Trade Exchange (CME) est hacké, provoquant l’inflation soudaine des prix du soja.
Carol Barrett, une agente chevronnée du FBI, encourage ses supérieurs à associer leurs efforts à ceux de la Chine. Mais le capitaine Chen est loin de l’idée qu’elle s’en était faite. Formé au MIT, avec une parfaite maîtrise de l’anglais, l’officier chinois insiste pour que ses homologues américains libèrent sur le champ un célèbre hacker détenu en prison : Nicholas Hathaway.
Six ans après Public Enemies, Michael Mann est de retour avec un thriller informatique de belle facture.
Mélange inspiré de virtuel et réel, le film illustre tout d’abord, via les images de synthèse et un montage parallèle nerveux (action/réaction), la vitesse vertigineuse à laquelle un virus numérique se propage, le flux impressionnant de données informatiques à travers la toile. Le récit est un affrontement à coups de clics, de codes à distance sur différents terrains de jeu (la plus belle scène est l’incursion dans le système informatique d’une banque au moyen d’une clé USB) avant des combats rapprochés, lourdement armés puis un mano à mano final lors d’une cérémonie balinaise à Jakarta, pugilat violent où le héros, délesté d’une technologie moderne, retourne à une sauvagerie primitive, aidé d’armes blanches, pour terrasser son ennemi.
Sont manifestes vitesse et précision (découpage au cordeau) dans ces scènes d’action d’une violence hyperréaliste filmées avec le talent légendaire de l’esthète Michael Mann (bel usage du numérique après Collateral et Miami Vice), toujours soucieux du réalisme des faits criminels et procédures policières dépeints dans ses récits policiers.
Nicholas Hathaway (le colosse Chris Hemsworth plutôt bon en hacker de génie) est un héros typiquement mannien, un super-professionnel jusqu’au boutiste et intrépide, maîtrisant l’art de la dissimulation et de l’attaque rapide. Ce hors-la-loi plutôt sympathique est opposé à un méchant retors, également un cador dans son domaine, un dangereux hacker au physique lambda qui pourrait être votre voisin, un touriste : la menace est anonyme, peut venir de n’importe où; le choix de ne pas montrer avant le dernier acte le visage du malfaiteur qui avance sournoisement, tapi dans l’ombre, les pièces de son échiquier, renforce la tension dramatique. Dans cet univers masculin dangereux et violent, l’adjonction d’une histoire d’amour avec une jeune femme asiatique (écho de Miami Vice) apporte quelques respirations sensuelles grâce à la mise en scène élégante de Mann, toujours efficace pour transcender une image ou une idée sur-utilisée grâce au découpage, un effet de ralenti ou un son, une musique.
Certainement moins intense que les excellents polars urbains Heat, Collateral qui ont fait la légende Mann, Hacker se révèle prenant grâce à l’exigence coutumière de son réalisateur dans l’exécution des scènes d’action et l’accumulation de rebondissements bien ficelés dans cette course intrépide qui conduit, pour notre plus grand plaisir, les personnages de Hong Kong à Manille en passant par Chigago pour contrer une menace numérique à l’échelle planétaire.


