M le Maudit : le test blu-ray
M le Maudit : le test blu-ray

M le Maudit : le test blu-ray

Réalisateur
Fritz Lang
Acteurs
Gustaf Gründgens, Otto Wernicke, et Peter Lorre
Pays
Allemagne
Genre
Policier et Thriller
Durée
112 min
Titre Original
M
Notre score
10

Toute la presse ne parle que de ça : le maniaque tueur d’enfants, qui terrorise la ville depuis quelques temps, vient de faire une nouvelle victime. Chargé de l’enquête, le commissaire Lohmann multiplie les rafles dans les bas-fonds. Gênée par toute cette agitation la pègre décide de retrouver elle-même le criminel : elle charge les mendiants et les clochards de surveiller chaque coin de rue…

L’avis de Fabien

M le maudit (M – Eine Stadt sucht einen Mörder), sorti en 1931, est le premier film parlant de Fritz Lang après de nombreux films muets dont le chef d’oeuvre Métropolis en 1927. Le scénario, coécrit avec Thea von Harbou, sa compagne de l’époque, s’inspire librement de l’affaire de Peter Kürten, un tueur en série arrêté en 1930, surnommé le « vampire de Düsseldorf ».

M le maudit relate la traque d’un tueur d’enfants dans une Allemagne pré-nazie pointée du doigt. Monument de mise en scène, le film de Lang déploie brillamment la grammaire cinématographique : cadrages virtuoses avec contre-plongée impressionnante et plongée vertigineuse, composition savante des plans d’un n&b expressionniste, puissance du montage alterné, utilisation brillante du hors champ.

Fritz Lang maîtrise l’art de l’ellipse, de la suggestion. Ainsi on devine la mort d’un enfant par une balle qui roule depuis le bord cadre ou un ballon de baudruche pris dans les fils d’un poteau téléphonique. De plus on assiste à un dévoilement progressif du monstre Franz Becker : Lang décide de montrer par bribes le meurtrier, avec tout d’abord son ombre puis son dos et sa nuque et enfin son visage et son corps. La folie de Becker, incarné avec intensité par Peter Lorre, un individu à la psyché fissurée, assailli par des pulsions morbides, est traduite par des effets de cadrage : reflet dans un miroir, cadre dans le cadre (M encadré par un losange de couteaux dans la vitrine d’une coutellerie).

La traque de la bête par des gangsters et la police se déploie dans la seconde partie grâce à l’utilisation révolutionnaire de la voix-off  comme moteur de l’action et le montage alterné pour créer de la tension. Cette chasse à l’homme culmine dans une scène d’une grande intensité dramatique où la pègre organise le procès de M dans une usine désaffectée. Est montrée une foule furieuse prête aux pires horreurs pour mettre hors d’état de nuire un individu nuisible.

Lang parlait ds son livre Trois lumières d’une « mission de donner à propos d’événements réels un avertissement, un éclaircissement et d’avoir en définitive une action préventive ». Le point de vue omniscient est utilisé à des fins dramatiques comme satiriques. Le montage alterné permet, en mettant en regard les recherches des gangsters et de la police pour capturer le tueur, une représentation satirique de policiers dilettantes; en témoigne cette contre-plongée terrible sur un inspecteur bedonnant dont l’efficacité professionnelle est mise en doute. Le dernier plan et les paroles d’une mère endeuillée montre la victoire relative du pouvoir  judiciaire.

En outre le son est un protagoniste à part du film, source d’expression et de signification. 1/3 des séquences furent tournées en muet pour apporter un contraste sonore. Le son est rendu perceptible par son contraire, le silence. M le maudit est un festival impressionnant de jeux de silence. On n’est pas prêt d’oublier la ritournelle terrorisante sifflée hors champ par le tueur. En effet ce dernier est entendu avant d’être vu et sera identifié par un aveugle.

Après M le maudit, Lang tournera Le testament du Docteur Mabuse (disponible également chez Tamasa) avant de quitter l’Allemagne pour les USA où il signera nombre de grands films noirs comme La rue rouge (1945), Le secret derrière la porte (1948), House by the river (1950) ou Les contrebandiers de Moonfleet (1955). Son dernier film, tourné en Europe, sera Le Diabolique Dr Mabuse (1960).

M le maudit est un chef d’oeuvre à (re)voir sans modération!

M le Maudit : le test blu-rayTechnique

Cette édition combo blu-ray + dvd signée Tamasa propose une superbe version restaurée 2K effectuée en 2011, d’une durée de 111 min.

Nonobstant quelques pétouilles, rayures, la qualité du master s’avère impressionnante pour un film de cet âge avec des contrastes de belle tenue et un piqué très correct.

La piste audio est également très satisfaisante, avec une bonne dynamique et un mixage correct. Le contraste entre les scènes sonores et muettes est frappant. On notera un peu de souffle et des réverbérations dans les voix mais rien de gênant.

La qualité inespérée de la copie permet de (re)découvrir ce monument du 7ème art dans de très bonnes conditions techniques.

Bonus

L’unique supplément du blu-ray s’intitule « M, un chef-d’œuvre visionnaire », par Faruk Günaltay (43’) : le directeur du Cinéma L’Odyssée à Strasbourg propose une analyse intéressante du film et de son contexte.

Ce digipack comprend également un livret de 16 pages, des extraits du dossier pédagogique rédigé par Mireille Kentzinger pour l’opération Lycéens et Apprentis au Cinéma : l’analyse de la séquence de la traque, le montage avec le principe de l’alternance, le récit (choix du point de vue, la sérialité).

M le Maudit : le test blu-ray
M le Maudit : le test blu-ray
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