Critique de Sadako 3D
Synopsis
Un illuminé parvient à créer une nouvelle vidéo maudite en ravivant l’esprit de Sadako. Cette vidéo, le montrant se sacrifier en plan fixe, condamne quiconque la regarde à un sort funeste. Akane, une jeune professeur de lycée, va se retrouver harcelée par la terrifiante séquence suite à la propagation opérée par ses étudiants sur leurs smartphones.
Avis de Yanick RUF
Le retour de la vidéo tueuse…
Reprendre la légende de Sadako dans les années 2010 était un pari risqué. Hideo Nakata avait marqué l’histoire du cinéma d’horreur japonais avec Ringu (1998), un film où chaque plan distillait l’angoisse et la suggestion. Dix ans plus tard, Sadako 3D s’inscrit dans une époque où les K7 ont disparu, remplacées par les écrans d’ordinateurs, les smartphones et la viralité numérique. Ce glissement vers la modernité devient le cœur du propos : la malédiction ne circule plus dans un objet physique, mais à travers le réseau mondial, dans les fichiers et les flux vidéo.

Tout est donc pensé pour la 3D. Les objets, les cheveux, les mains de Sadako semblent bondir hors de l’écran, parfois jusqu’à l’excès. Vue sans lunettes, cette surenchère laisse une impression fade : les effets paraissent artificiels, conçus davantage pour un manège de fête foraine que pour un film d’horreur atmosphérique. La peur, ici, se veut immédiate et spectaculaire, là où la saga originale jouait sur le non-dit et la suggestion.
L’intrigue s’articule autour d’une vidéo en ligne qui pousse ses spectateurs au suicide. Son origine indéterminée alimente la rumeur : tout le monde veut la trouver, chacun cherchant à se prouver qu’elle existe. Dans un Japon connecté où chaque lycéen possède désormais un smartphone, la propagation est inévitable. L’idée est séduisante, car elle transpose intelligemment la logique virale des années 2000 dans l’univers de Ringu. Sadako devient presque une intelligence artificielle malveillante, capable de contourner le darknet pour se faire remarquer, comme si elle désirait être vue.

Le récit met en scène un duo d’enquêteurs contrastés : l’un, policier à l’ancienne, tâtonne face à la technologie ; l’autre, jeune et rompu aux arcanes d’Internet, explore la piste numérique. Leur complémentarité reflète le choc entre deux époques, celle du polar traditionnel et celle des cyber-enquêtes contemporaines.

Au centre, l’héroïne Akane Ayukawa (interprétée par Satomi Ishihara) apporte une touche inhabituelle : dotée d’un cri surnaturel capable de briser les écrans, elle constitue l’arme principale contre Sadako. Ce pouvoir, découvert dans Sadako 3D 2 (la suite directe sortie un an plus tard) est toutefois ici esquissé à travers des flashbacks évoquant un passé trouble, entre drame personnel et capacités psychiques.

Le film, malgré ses bonnes intentions, souffre d’un problème récurrent : la franchise Ringu a tellement été revisitée qu’elle peine désormais à se renouveler. Sadako 3D se regarde sans déplaisir, mais laisse une impression d’artifice. Derrière ses effets numériques et ses jump scares calibrés, il manque ce frisson d’invisible qui faisait tout le charme de l’œuvre originale. En cherchant à ressusciter la terreur à travers la technologie moderne, le film transforme la malédiction en simple produit d’époque – un virus numérique qui, au lieu d’effrayer, amuse par son excès d’effets.

