Critique de Le rocher de l’Apocalypse
Synopsis
New York. Un mystérieux rocher est rapatrié dans les laboratoires d’archéologues de la ville. Il porte une inscription ancienne et, sculptée dans le roc, la tête d’une terrifiante créature. La jeune équipe d’archéologues va peu à peu découvrir qu’une terrible prophétie entoure ce rocher inconnu : un monstre est enfermé dans la pierre et seul un guerrier Viking pourra le combattre…
Avis de Yanick RUF
Restauration partielle ou bricolage nostalgique ? Difficile à dire. Le film reste enfermé dans son format 4/3, comme s’il voulait conserver une aura télévisuelle figée dans le temps. Un choix qui, volontaire ou non, renforce son charme kitsch.
Dès les premières minutes, une question plane : ce film veut-il revisiter l’Histoire, ou simplement la mélanger dans un grand chaudron de mythes et de malédictions nordiques ? Le scénario part d’un postulat aussi audacieux qu’improbable : et si les États-Unis n’avaient pas été découverts par Christophe Colomb, mais par les Vikings ? Une idée fascinante, malheureusement exploitée avec la subtilité d’un marteau de Thor. Le film surfe sur les légendes scandinaves (Fenrir, Thor, Ragnarök ,…) à une époque où ces mythes restaient bien obscurs pour le grand public.
Tout débute lorsqu’un archéologue découvre un étrange rocher couvert de runes indéchiffrables. Une trouvaille qui, évidemment, réveille une ancienne malédiction : l’esprit du loup géant Fenrir, emprisonné dans la pierre, choisit de se réincarner en possédant le corps du malheureux chercheur. Son apparence, loin de la majesté mythologique attendue, flirte davantage avec celle d’un monstre de série B en peluche mal peignée.

Le film cultive une frustration permanente : on ne voit jamais que des ombres, des griffes, un bout de fourrure, et beaucoup de brume. Et quelle brume ! Celle du musée, notamment, mériterait presque une mention spéciale tant elle semble constituer un personnage à part entière. Entre deux nuages de fumigène, le spectateur navigue entre scènes absurdes et dialogues involontairement comiques. Les policiers, stéréotypés jusqu’à la caricature, rivalisent d’hypothèses farfelues pour expliquer les meurtres : extraterrestres, animaux sauvages, sectes… Tout sauf un esprit viking millénaire réincarné.
Les moments cultes, eux, ne manquent pas : un cadrage improbable devant la lune pour une scène d’amour d’une naïveté confondante ; une séquence dans une galerie d’art où les spectateurs prennent un meurtre pour une performance contemporaine ou encore le cauchemar dans le cauchemar, flagrant pastiche du Loup-garou de Londres. Et que dire du flic mourant qui, le souffle court, trouve encore la force de faire un signe de croix face à un dieu païen… du grand art involontaire.

Le film sombre alors dans ce territoire fascinant de la parodie non voulue, là où l’horreur devient comédie, et où chaque faux raccord se transforme en gag visuel. Mention spéciale à la scène d’action où les policiers vident littéralement plusieurs chargeurs, douilles visibles en gros plan, avant qu’un plan large ne révèle un sol impeccable, immaculé.
Au final, Le Rocher de l’Apocalypse n’est peut-être pas le film d’horreur qu’il voulait être, mais il demeure un délicieux accident cinématographique. Entre folklore mal digéré, effets spéciaux bricolés et ambition mythologique, il a au moins le mérite de faire rire , souvent malgré lui.

