Zero Dark Thirty
Zero Dark Thirty

Zero Dark Thirty

Réalisateur
Kathryn Bigelow
Acteurs
Edgar Ramírez, Jason Clarke, Jennifer Ehle, Jessica Chastain, Joel Edgerton, Kyle Chandler, et Mark Strong
Pays
USA
Genre
Action et Thriller
Durée
149 min
Titre Original
Zero Dark Thirty
Notre score
8

Le récit de la traque d’Oussama Ben Laden par une unité des forces spéciales américaines…

L’avis de Manu Yvernault :

La campagne pré-Oscars (où tous les coups sont permis) a créé un conflit médiatique (de la presse américaine) à propos des séquences de torture dépeintes dans Zero Dark Thirty.

Mauvaise foi à consonance médiatico-politique puisque l’intérêt et le discours du dernier film de Kathryn Bigelow, tout en évoquant la question, se situe bien au-delà de ce simple débat.

Sous les apparats d’un thriller d’espionnage, la réalisatrice signe avec une intelligence marquée un film au plus proche du documentaire. Si on peut remettre en cause la véracité de certaines situations (déroulements), tant les services d’espionnage sont souvent opaques, la fluidité et la logique de l’histoire tendent à prouver une certaine authenticité.

Dans une première séquence forte de l’essence même de sa bande son (séquence au noir), la réalisatrice désire mettre en place une démarche de questionnement, démarche sous-jacente qu’elle ne quittera pas jusqu’au dernier plan, réponse visuelle cette fois, sentimentale, à cette première séquence.

On retrouve la thématique récurrente de la réalisatrice qui confronte l’homme à ses obsessions. Bien que guidée cette fois par autre chose qu’une poussée d’adrénaline (Point Break, Démineurs), l’héroïne souligne le fait d’être guidée autant par sa conviction personnelle que par un patriotisme toujours présent mais sous-jacent.

Le film échappe cependant à cette tentation américaine de trop souvent glorifier le patriotisme au nom d’un pays, d’un étendard. Ici Bigelow intellectualise le propos dans un mouvement individuel et de groupe, l’acharnement de l’héroïne à pousser son intuition au-delà d’une obsession aveugle est constamment mis en avant.

Si le film se suffit à lui-même c’est évidemment par son sujet dont tout à chacun connaît l’issue mais c’est également, une fois n’est pas coutume, par le portrait de femme que tend dépeindre la réalisatrice. Là, Jessica Chastain livre une interprétation juste et retenue.

Si Zero Dark Thirty semble moins imprégné que son précédent film, Démineurs, il gagne en qualité formelle, dans sa construction crescendo et un final (l’assaut) très intense. Au final on peut s’apercevoir que ce diptyque forme un tout, un outil narratif, une catharsis nécessaire à un pays avide d’en finir avec une de ses obsessions. L’absurdité de la guerre et des conflits couverts des apparats d’une mise en scène intelligente et humaine n’a que trop rarement été filmé de cette manière ces dernières années. Bigelow emprunte le chemin des grands metteurs en scène et devra cependant confirmer son talent, dans un autre genre maintenant.

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L’avis de Fabien

Après le succès de Démineurs, titulaire en 2010 de six Oscars dont Meilleur film et réalisateur, Kathryn Bigelow poursuit dans la thématique guerrière et le conflit au Moyen-orient avec Zero Dark Thirty, consacré à  la traque d’Oussama Ben Laden par une unité des forces spéciales américaines.

Bigelow a de nouveau fait équipe avec son partenaire de Démineurs Marc Boal, ancien journaliste d’investigation, pour l’écriture du scénario qui débute par le 11 Septembre avec les enregistrements audio des victimes et témoins de la tragédie jusqu’à l’élimination de Ben Laden, le 1er mai 2011, au Pakistan.

Le traitement, brut et réaliste, du récit de cette traque étalée sur dix ans dans plusieurs pays multiplie les personnages du côté américain comme du côté des terroristes et les lieux, des Etats-Unis au Pakistan en passant par l’Afhganistan, pour décortiquer, avec un souci du détail et du réalisme probants, cette enquête acharnée menée par la CIA, relatée dans un esprit de « reported film » selon les mots de Bigelow. Factuel, bien documenté, le scénario est marqué par de nombreuses attaques sur le sol américain et à l’étranger contre les occidentaux, le 11 septembre via l’audio puis images de l’attentat de Londres en juillet 2005, explosion dans un restaurant de l’hôtel Marriott à Istanbul en 2008 et attentat contre le personnel américain du camp Chapman en Afghanistan en décembre 2008, une séquence redoutablement mise en scène et montée se déroulant dans le désert où le temps semble dilater pendant l’attente d’un atout avant une brutale explosion.

Cette recherche documentaire conduit évidemment à évoquer les procédures connues de l’agence, notamment l’usage de la torture, l’intimidation, la corruption pour glaner petit à petit des informations pouvant aboutir à l’arrestation de terroristes. Le début du film s’ouvre ainsi sur la torture d’un lieutenant présumé de Ben Laden dans un site noir de la CIA, deux scènes éprouvantes filmées de manière clinique, la mise en scène de Bigelow faisant le choix de la neutralité de point de vue. L’assaut final, dans la demeure de Ben Laden au Pakistan, est ainsi reconstitué de manière brute, sans effets stylistiques, dans un style reportage de guerre filmé en temps réel avec vision infra-rouge; en résulte une tétanisante séquence de 30 minutes, un morceau de bravoure où la topographie (un genre de labyrinthe) conjugué à l’obscurité ajoutent à la tension dramatique (même si l’issue est connue de tous).

A la manière de Zodiac, Zero Dark Thirty est le décorticage précis d’une longue enquête longtemps déceptive pour arrêter l’ennemi public numéro un par une enquêteur obsessionnel, ici en l’occurrence une jeune femme de la CIA interprétée avec justesse par Jessica Chastain. Son personnage de Maya est le coeur du film : nous suivons sur dix années son travail acharné et méticuleux, entre séances d’interrogatoire où la gêne cède la place à l’implication, analyse de vidéos, échanges vifs avec sa hiérarchie, réunion de travail dans les headquarters de la CIA, planification de l’assaut contre OBL… Chastain traduit subtilement, par petites touches, la détermination sans failles (très bonne scène de tension avec son chef de poste interprété par Kyle Chandler) d’un personnage rongé par son objectif, l’épuisement physique provoqué par un travail sans relâche, dangereux mais aussi la tristesse face à la mort d’une collaboratrice sans oublier ce dernier sentiment ambigu, une victoire au goût amer que semble indiquer ses larmes et son regard perdu (so, what’s next?).

Après Démineurs Bigelow frappe à nouveau un grand coup dans le genre du film de guerre, avec le passionnant récit détaillé et procédurier de l’enquête sur Ben Laden qui trouve son aboutissement dans la spectaculaire attaque de la demeure du terroriste. Jessica Chastain en enquêtrice acharnée y est une fois de plus brillante.

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Test blu-ray

Technique

Le piqué redoutable, les images ultra-précises hormis lors de la séquence finale où l’assaut nocturne filmé sans éclairage nous donne volontairement moins d’infos sur l’action, bénéficient sans conteste de la haute définition, imparable, indispensable.

La piste  anglaise en 5.1 DTS HD Master Audio est clairement plus efficace que son homologue française avec un environnement sonore riche et puissant logiquement récompensé par l’Oscar du meilleur montage des effets sonores.

Bonus

Cette édition blu-ray  Universal propose comme bonus quatre courts documentaires.

Tout d’abord le module « Pas de petit exploit » (4′) constitue un mini making-of du film avec interventions du casting, propos de la réalisatrice et du scénariste sur l’écriture, images du tournage notamment  l’attaque nocturne où la réalisatrice voulait « emmener le public sur le terrain, au coeur de l’évènement ».

« La résidence » (9′) est axé sur le décor impressionnant de la demeure/forteresse de Ben Laden. L’équipe déco a construit en Jordanie une réplique à l’identique de la résidence du terroriste à Abbottabad au Pakistan.

« Bien préparés » rend hommage  à la Team Seal Six, le nom de l’équipe des forces spéciales qui a mené l’assaut contre Ben Laden, à travers la reconstitution saisissante  de ce raid pour lequel Bigelow a collaboré avec des experts militaires, des anciens Seals ainsi que des experts en avionique pour la construction d’hélicoptères furtifs. Afin d’être crédibles les acteurs dont Joel Edgerton ont été envoyés dans un camp d’entrainement en Jordanie et ont utilisé les mêmes armes que les Seals.

Enfin est fait un Gros plan sur Jessica Chastain (5′),  actrice douée et impliquée pour qui son personnage d’agent de renseignement rappelait le personnage de Jodie Foster dans Le silence des agneaux. Elle se déclare avoir été « émue et passionnée par le cheminement narratif du personnage » et le fait que l' »on la voit grandir dans le film ».  Pour l’actrice Zero Dark Thirty est « un film important. Le JFK de notre génération ».

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