Prisoners
Prisoners

Prisoners

Réalisateur
Denis Villeneuve
Acteurs
Dylan Minnette, Hugh Jackman, Jake Gyllenhaal, Maria Bello, Melissa Leo, Paul Dano, Terrence Howard, et Viola Davis
Pays
USA
Genre
Thriller
Durée
153 min
Titre Original
Notre score
8

Dans la banlieue de Boston, deux fillettes de 6 ans, Anna et Joy, ont disparu. Le détective Loki privilégie la thèse du kidnapping suite au témoignage de Keller, le père d’Anna. Le suspect numéro 1 est rapidement arrêté mais est relâché quelques jours plus tard faute de preuve, entrainant la fureur de Keller. Aveuglé par sa douleur, le père dévasté se lance alors dans une course contre la montre pour retrouver les enfants disparus. De son côté, Loki essaie de trouver des indices pour arrêter le coupable avant que Keller ne commette l’irréparable… Les jours passent et les chances de retrouver les fillettes s’amenuisent…

 

L’avis de Manu Yvernault : 

Denis Villeneuve c’est une poignée de belles et franches réussites : Maelström, Polytechnique et plus récemment Incendies,qui lui a apporté une notoriété internationale bienvenue. Au-delà de sa filmographie toujours plus proche des drames, c’est un metteur en scène qui émerge cette fois avec une franche maturité, les quelques défauts (vraiment infimes d’Incendies) sont ici effacés autant par l’efficacité de sa narration que dans sa mise en scène presque exceptionnelle.

Nous sommes en premier lieu surpris par la qualité de la mécanique narrative. Aaron Guzikowski, coupable du script de Contrebande, trouve avec efficacité la mécanique imparable à son histoire. Fort de ses personnages, l’histoire de ces deux familles à la recherche de leur fille respective n’a rien du cliché. Le fil conducteur de l’histoire devient alors très vite le détective Loki, interprété par Jake Gyllenhaal, plus rare sur les écrans ces derniers temps, mais toujours aussi impeccable dans son interprétation.

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On connait parfaitement la couleur des films de Denis Villeneuve, équilibre entre intensité des émotions tout en versant légèrement vers le thriller. Autant dans le ton que dans sa forme, souvent en flashbacks, sinon morcelée comme un puzzle à résoudre. Si dans Incendies certains contours pouvaient paraître un peu gros, notamment la perte d’intensité une fois l’intrigue principale dévoilée, ici, la mise en scène est loin d’être prétentieuse et minutieuse. Plus élégant encore, les twists, en nombre conséquents, ne sont pas présents pour surprendre et séduire le spectateur. La qualité première de Prisoners est intelligemment placée ailleurs. Avant tout dans son ambiance, puis de manière équilibrée, dans son interprétation (direction d’acteurs également) ainsi que dans sa mise en scène.

Si le spectateur réunit quasiment les indices avant les protagonistes, l’enjeu n’en pâtit jamais. L’âpreté de ce drame valse entre divers émotions où chaque personnage apporte sa contribution. On a rarement vu un thriller dramatique où l’ensemble du casting joue autant parfaitement son « rôle ».

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Hugh Jackman et Jake Gyllenhaal explosent littéralement l’écran, quand Maria Bello et Paul Dano rendent crédibles des rôles qui auraient pu facilement tomber dans l’exagération. Le reste du casting se met au diapason de ces interprétations de hautes tenues.

Si le scénario comme on peut le relever fait la part belle à la qualité globale du film, il n’en serait rien sans la minutie de la mise en scène de Denis Villeneuve. Tout y est, du classicisme référencé que le genre demande, à des prises de risques qui s’avèrent finalement donner une autre dimension au film (on pense notamment à ces fondus au noir amenant une ellipse dont on ne saura souvent rien). Le tout sublimé par la photo de Roger Deakins (Les évadés, Fargo, Skyfall), réellement épatante.

Jusqu’ici tout semble parfait. Or, on émet cependant un bémol sur le discours sous jacent du film.

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Clairement référant à cette Amérique post 11 septembre, où la paranoïa et se faire justice résonnent comme une chape de plomb morale. Les prises de positions s’avèrent finalement assez peu risquées, le bien/le mal, l’émotion/la morale, la figure autoritaire/paternelle…On reste constamment dans un entre-deux. Rien de réellement gênant pour le métrage en lui-même. Seulement, vu certaines questions traitées, plus de clarté aurait été bienvenue. Loin de cautionner la loi du talion le film verse dans un final qu’on aurait aimé plus « tranchant ».

Point important mais qui ne gâche en rien le plaisir d’un film qui a su tenir en haleine le spectateur sur près de 2h30, sans aucun temps mort, virevoltant entre thriller pur et dur, moments dramatiques poignants où les émotions portent le spectateur d’instants bouleversants à déchirants.

Si le dilemme moral du film n’est en rien original et ne répond encore une fois pas totalement à la question « faut-il se faire justice soi-même ? », Prisoners est bel et bien une franche réussite, plus par le ressenti qu’il procure que les twists inhérents au genre.

Alors que la radicalité morale du film s’avère presque absente, la mise en scène extrêmement soignée de Denis Villeneuve contribue pleinement à un joli tour de force portant Prisoners dans la caste des thrillers référents.

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